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Légende du père Jean-Jean transmise par Léo Ganachaud, éxtraite de «  Lée bitons Chérentais »

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Ol était du temps ou o se promenait souvent dées fées dans noute pays qu’ol a arrivée ce qui va vous dire. Quio la qui avait la chance de faire la rencontre d’ine boune fée peuvait zi faire sa fortune, mé ine fois qui l’était riche , si fazait le fiéraud a zi otiant tout ce qu’a y aviant dounée. Ol é ce qu’a arrivé à la vieille Jeantouse queume vous allait vouère . Ol était dont in onze de juin , en piéne saison dées cerises , et la Jeantouse passait en s’en venant de la fouère de Marcilla peure lée Montaignons, afin de vouère à son guindounier. Lées guindons étiants points encore trop mûres, mé a n’en cuyit quand même sa piene devantière . A l’ arrivit châ elle toute ébaffée pasqu’o fazit ine chaleur dos yabe . La première affaire qu’a vouéyit fut ine pauve vieille aveuzée su le baseil de sa porte . Au yeu de la rudoyée queume quièques sotras ariant pu faire , a zi demandit bin poliment ce qu’a fazait là , et si a l’avait bezoin de quieuque chouse . Quielle vieille zi répounit qu’a mangerait bin dées cerises et la Jeantouse zi bayit ine pougnée de guindons , en s’excusant qui n’étiant pas encore bin mûres et in petignot aigrelets. Puis a l’invitit à se repôser chez elle et , la neut rendue , a la fit couchée dans in méchant lit a coutée d’elle . Le lendemain , avant de s’en allée , la vieille dizit à la Jeantouse :  « Vous avé étèe boune peure moué , y m’en va vous faire in cadeau. Voilà trois petites boules, si vous avait bezouin de quieuque chouse jettait n’en ine dans voute pouée, et le temps qu’a coulera fazait in veut, tout de suite y sera éxaucée » Quand la vieille fut partie , la Jeantouse ine foué toute seule, réfiéchissit à ce qu’à peurait bin demandée. A se decidit à demandée de deveni jène, qu’étout quo y a de pu beau que d’être jène ! Et a jettit ine boule en demandant de revenir à vingt ans . A la minute à fut ine jolie fille bin habillée et couvarte de dorures. Et avoure qu’a songit à ine jène drôlesse a faut in jène mâle , et a jettit la seconde boule en démandant ine houme . Tout de suite , devant elle o se présentit in ferluquet , poumadée et bien foutu qui zi fazit la révérence queume a ine marquise . I causiant in moument et fuyant d’accord quo leur felait asteure ine belle maison, dées jolis chevaux , dées voétures, dées valets , dées servante et surtout dées piens sacs d’écus . I jettiant la darnière boule et a la piace de la cabane o se mettit in chateau, avec tout ce quo felait dedans . Ah! O ne faut pas longtemps peure prendre goût a faire lées bourgeois , o felait vouére la Jeantouse se peurlasser dans quielles lées belles vouétures et faire la fiéraude . O durit queume ça pendant quieuques ennées , et tant mée quo l’allait tant mée qua l’était minprisante ; a l’arait passé su le monde. In jour qu’a revenait de la promenade , sa belle vouéture s’arréetit (s’arrétit) devant la grille dorée de son château , o y avait ine pauve vieille accoté conte le pillée de la barrière , qui zi demandit l’aumone d’in bout de pain . « Passé voute chemin quo répounit la Jeantouse , pasque la porte sera pas putou duvarte que nos chins vous mangerians , i n’ aimant point les gens si mal habillée que vous. »
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« Ah ! Ol é queume ça , quo répounit la vieille , quand tu restis dans ine cabane , tu étis boune et charitable , astoure que tu demeure dans in château tu as le quiur pu dur qu’in roc et bin redevin ce que tu éti avant . »
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Et au même moument le château disparaisit , et la Jeantouse redeveni ine pauve vieille ayant en tout et peure tout sa cabane et sées deux chèvres .